Cette journée organisée par le département Hospitalo-universitaire d’hématologie à l’hôpital Saint-Antoine, a réuni plus de 200 participants essentiellement des professionnels de santé et des représentants de laboratoires travaillant en hématologie.
L’objectif de cette journée était de présenter les dernières avancées en hématologie, notamment celles présentées lors du dernier congrès de la société américaine d’hématologie (ASH).
La journée a débuté par une intervention du Pr Agnès Buzyn, hématologue, présidente de la HAS (Haute Autorité de Santé) sur la thématique coût/efficacité en hématologie.
Après avoir présenté le dispositif existant en place en France pour évaluer les nouveaux médicaments en termes de Service Médical Rendu (SMR), elle a évoqué le contexte et les défis auxquels avaient à faire face les agences réglementaires nationales face à l’évolution des prix des médicaments
Elle a ainsi évoqué :
- Qu’entre 1995 et 2013, le coût des médicaments a évolué à la hausse de plus de 10% par an. Qu’à titre d’exemple le coût d’un traitement qui s’élevait à 50 000 $ pour 5 mois de bénéfice de survie en 2004, était en 2011 de 120 000 $ pour 4 mois de bénéfice de survie.
- Que cette situation fait que dans de nombreux pays les négociations de prix sont "sous pression des associations de malades", eu égard au fait que pour certains d’entre eux l’accès à ces nouveaux médicaments est une question de survie.
- Qu’aujourd’hui seul un petit nombre de médicaments sont évalués comme apportant une Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR) importante (de niveau 1 à 3).
- Que la HAS avait mis en place une évaluation médico-économique, évaluation qui s’appuie sur le ratio "ICER" qui évalue le coût des traitements en euros par année de vie gagnée, qu’en France et contrairement à ce qui a été mis en place en Grande Bretagne aucun seuil n’a été fixé en termes de remboursement.
Pour illustrer son propos, elle est revenue sur l’exemple du myélome multiple, maladie pour laquelle le coût de traitement, eu égard aux nouveaux médicaments disponibles, va passer de 100 000 à 500 000 Euros par an vraisemblablement, sans tenir compte des coûts de diagnostic et de surveillance.
Elle a conclu son exposé en soulignant trois points :
- Le fait que les prix des médicaments sont déconnectés des gains réels qu’ils procurent aux malades, ce qui devient d’une certaine façon rédhibitoire,
- Qu’Il est essentiel d’évaluer les médicaments en conditions de vie réelle,
- Que ces questions doivent être traitées au niveau international, sur ce point elle s’est félicitée que cette question a été abordée lors du dernier G7.
Que retenir concernant le myélome suite au dernier congrès ASH de début décembre ?
Mohamad Mohty a rappelé qu’1/3 des communications présentées lors de ce congrès portait sur le myélome multiple, que le myélome était la maladie en hématologie pour laquelle il avait été délivré le plus d’Autorisations de Mise sur le Marche (AMM) de nouveaux médicaments au cours des cinq dernières années.
Eu égard au temps prescrit pour sa présentation (20 minutes) il a souhaité mettre l’accent sur trois points qui bien évidemment se veulent non exhaustifs.
1. Traitement des patients jeunes en première ligne
Il a mentionné que les résultats d’une étude US dite « STaMINA », analysée avec un recul de 38 mois, étude comparant les traitements par autogreffe (une ou deux) ou sans 2ème autogreffe et avec ou sans consolidation, ne faisaient ressortir aucun avantage quelle que soit l’approche.
Ce qui serait de nature à démontrer qu’avec les nouveaux médicaments disponibles les traitements d’induction, une seule autogreffe et un traitement d’entretien bien conduit, seraient suffisants pour permettre aux malades d’atteindre une rémission excellente et une survie prolongée. Ces résultats contrastent avec ceux d’une étude européenne qui montre un bénéfice au traitement de consolidation court en post autogreffe.
Il a évoqué également les résultats de l’étude de phase 2 de l’IFM qui ont montré que près de 70% des malades traités avec du carfilzomib (Kyprolis) + autogreffe avaient atteint un niveau de maladie résiduelle négatif.
2. Traitement des patients en rechute :
Les résultats des études en cours montrent que même en rechute il est aujourd’hui possible d’atteindre des niveaux de rémission excellents (avec un niveau de maladie résiduelle négatif supérieur à 10-5 pour plus de 35% des malades concernés), que ces résultats sont possibles grâce notamment aux combinaisons à base de Daratumumab (Darzalex).
D’autre part, les résultats de l’étude PAVO en cours qui vise à tester l’administration du Daratumumab (Darzalex) en sous-cutané (avec adjonction d’une enzyme) laissent entrevoir une efficacité comparable à une administration en intra veineux. Le bénéfice pratique d’une forme sous-cutanée du Daratumumab sera majeur.
3. Traitement des malades réfractaires aux traitements existants
Une étude Italienne a testé un protocole à base de carfilzomib (Kyprolis) + Pomalidomide (Imnovid) et Dexaméthasone : elle a conduit à plus de 60% de réponses objectives1 à deux mois, ce qui laisse entrevoir une vraie synergie entre le carfilzomib et le Pomalidomide.
Enfin les premiers résultats des essais de phase 2 sur de nouveaux médicaments très spécifiques tels que le Selinexor (étude STORM), le Venetoclax montrent qu’à court terme l’on devrait disposer de médicaments efficaces dans des situations de maladie très avancée, mais aussi pour la première fois de traitements qui ciblent une sous-classe de malades atteints par un myélome positionné comme très agressif.
[1] Le taux de réponse objective (ORR) est le critère de jugement lors de la mise au point d'un nouveau traitement, c'est le taux de réponse tumorale c’est-à-dire la proportion de malades dont la tumeur régresse ou n’évolue pas sous traitement.
Dans un essai thérapeutique il est impératif de savoir rapidement si le médicament est efficace ou non. L'un des 3 principaux critères est le taux de réponse objective : le pourcentage de patients en RC ou RP.